Le sommelier, c’est un de vins

En notre qualité d’œnopote, œnophile, en un mot d’amoureux des bons vins, nous souhaitons rendre hommage à une bien belle profession : Sommelier.

L’ »ânée » est un mot bien connu des cruciverbistes. C’était jusqu’au XIX° siècle, la charge de vin que pouvait porter un âne (une cenpote, soit110 litres). Ce transport se faisait sans crainte puisque, depuis Buridan, nous savons que, si l’on propose à un âne un seau d’eau et un seau de vin, il boira l’eau, et c’est précisément en cela qu’il est un âne.

En Provence, la charge de la bête est appelée la sommée. Et tout naturellement, le sommelier désigne le conducteur de bêtes. Puis le mot se spécialise pour désigner l’officier chargé du transport des bagages dans les voyages de la Cour, puis celui en charge de la vaisselle, des provisions et de la cave… et enfin le monsieur vins que nous connaissons aujourd’hui. Le sommelier contrôle tout : chargement, déchargement, transvasement. Une vraie bête de somme !

Si dans certaines maisons, le sommelier était malheureusement considéré comme un simple manutentionnaire et un gestionnaire de stocks, les choses ont bien évolué et son statut s’est ennobli. Contrairement à une idée préconçue il n’est pas là nécessairement pour placer les bouteilles les plus onéreuses, mais pour vous conseiller. Aussi faites appel à lui. Écoutez-le, il deviendra le véritable complice de votre plaisir.

Et laissons la parole au poète. Raoul Ponchon, dans le Courrier Français du 25 février 1900 leur rendait hommage :

Que j’aime à voir autour de cette table
Des sommeliers, encor des sommeliers ;
Au monde il n’est rien de plus respectable
Qu’un sommelier, sinon deux sommeliers.

O sommeliers ! vous êtes tous des braves,
C’est bien certain, car ça n’est pas en vain
Que vous avez commerce avec les caves,
Que tous les jours vous fréquentez le vin.

Entre tous les métiers que l’on répute
Le vôtre, amis, est pour moi le premier ;
Si je n’étais simple joueur de flûte,
Je voudrais être un digne sommelier.

Parbleu ! les chefs ont bien leur importance
Pour un festin. Quant à moi, je m’en fous.
Non, non, les chefs, ils ne sont pas, je pense,
A beaucoup près importants comme vous.

C’est pour le mieux quand les deux vont ensemble.
Bonne chère et bon vin font amitié.
Mais un rata si bon qu’il soit, ce semble,
Mal arrosé, n’est-ce pas grande pitié ?

Ah ! donnez-moi pour toute nourriture
N’importe quoi, ne fût-ce qu’un pain sec,
Mais, nom de Dieu, d’un joli vin nature
Je veux au moins me barbouiller le bec.

Au temps jadis, quand les rois tenaient tables
Et qu’ils savaient boire comme des dieux,
Les sommeliers étaient grands connétables.
Et les celliers ne s’en portaient que mieux.

Les rois sont morts. Et notre République
Se meurt de soif, malgré son galoubet ;
Le moindre vin lui donne la colique.
Que voulez-vous qu’on boive chez Loubet ?

On voit aussi des médecins en vogue
Recommander à nos petits boyaux
De l’eau, du lait et d’autres sales drogues…
Est-il permis de pareils idiots ?…

La France, hélas ! deviendrait chose morte
S’il fallait croire en ces hurluberlus.
Zut pour leur eau, que leur eau les emporte !
Et nous, buvons du vin quatre fois plus.

Non, par Bacchus ! tant qu’elle aura des treilles,
La France encor vivra ; tant qu’elle aura
Des sommeliers pour les mettre en bouteilles
Et tel têtu gosier qui les boira.

Buvons nos vins jusqu’à ce qu’on en crève,
Le fin Bordeaux qui fleure le printemps,
Le Bourguignon en qui monte la sève,
Et le Champagne, excellent cure-dents.

Versez-nous-les toujours à pleine amphore,
O sommeliers ! Tous ces vins que voici.
Et puissiez-vous nous en verser encore
Et du meilleur dans cinquante ans d’ici.

Car quoi que puisse en penser le vulgaire,
Comme l’a dit si bien… Chose… Machin…
Le plus beau geste, à coup sûr, de la terre
C’est de verser à boire à son prochain.

Mon Dieu, parfois, en des cafés notables
Votre patron qui vous le dit tout bas,
Vous fait servir des choses discutables,
Dont, grâce à Dieu, vous, vous ne buvez pas…

Mais arrêtons ici ce radotage,
Je craindrais de vous causer de l’ennui.
Si j’ai parlé c’est pour vous rendre hommage
Et je remets ma lyre en son étui.

O sommeliers que le ciel accompagne,
Puisque aussi bien nous sommes au dessert,
Je bois à vous ce verre de Champagne
Qui plus que moi se montrera disert,

Le voyez-vous qui pétille et qui bouge ?
Il n’en est pas ainsi des milliers.
Vive donc le G.H. Mumm Cordon rouge !
Vive Jourdan et tous les sommeliers !

Rien à rajouter. Champagne !

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *