Maths un peu

mona-equation

Purée de ta mère ! Un bruit d’enfer se dégage de ma bagnole au niveau des roues. Arrêt chez le garagiste qui sans hésiter diagnostique un problème de cardan. Quèsaco, lui lançais-je ? Avec la rapidité de l’éclair, il me jette à la face : le joint de cardan, dénommé abusivement cardan permet au moteur de transmettre l’énergie aux roues, indépendamment des oscillations que subissent ces roues du fait des inégalités de la chaussée.

C’est pas plus clair pour moi, mais ça en bouche un coin. Désarçonnée mais pas battue, je lui demande : et pourquoi cardan ? S’essuyant les pognes dans un tissu maculé de graisse, de sueur et de cambouis… il me regarde comme si je lui demandais de pondre un œuf. Sa maïs vissée sur les babines, il a le regard aussi vitreux que la pyramide du Louvre. Après un silence long comme un hiver sibérien, il finit par lâcher : on a toujours dit cardan, ma p’tite dame, un point c’est tout. Alors vous me la laissez votre chignole ?

Rentrée à pinces at home, je me jette sur l’ordi pour chercher tout ce qui se dit sur le cardan.

Illico, la toile me révèle que c’est le blaze d’un mathématicien Italien de la Renaissance : Girolamo Cardano. En plus, le rital, il était médecin, philosophe, astrologue. Et dans le genre savant touche à tout, il a rien à envier à Léonard de Vinci. Plus de deux cents ouvrages scientifiques au compteur, ça oblige au respect. Entre autres, Girolamo il a résolu les équations du troisième et quatrième degré. Il fut pionnier dans le domaine de la statistique et des probabilités. Il a établi le rapport entre la densité de l’air et celle de l’eau. En médecine, il élabora nombre d’onguents pour soulager la douleur et les infections.

Par contre, la vie du Macaroni, c’est pas la joie. Fils illégitime d’un jurisconsulte, sa mère lui répète qu’elle s’était faite tricoter le moujingue et que s’il était là, c’était pas voulu. Et pour appuyer son discours, elle lui flanque des baignes à lui faire cracher son dentier. Malgré tout, le petiot poursuit de brillantes études. Il se marida sur les 31 balais ; après douze ans, sa femme le rend veuf avec deux marmots à élever. L’ainé empoisonne son épouse et est exécuté. Son second fils le cambriole puis le dénonce à l’Inquisition. Avouez que ça fait beaucoup pour un seul homme.

Mais revenons sur ce second fils, Aldo. Pourquoi a-t-il volé son paternel ? Pour effacer des dettes de jeux. Il faut dire que Girolamo, il lui a passé le virus. Dans sa jeunesse, grâce à ses travaux sur les probabilités, il devient un redoutable joueur. Mais Aldo, c’était pas une lumière !

Quant à son arrestation sur dénonciation du fiston, c’est dû à sa passion pour l’astrologie. Et le bougre, il a voulu reconstituer l’horoscope du Christ et voulu démontrer que la mort de Jésus était due à la conjonction de deux planètes. Et l’inquisiteur, il rigole pas avec ces choses là. Cardano est condamné à une forte amende et jeté en prison. Radié de la fac et de revenus, il abjure pour retrouver la liberté.

Il finit sa vie à Rome et perçoit une pension du Pape. Le 21 septembre 1576, âgé de 75 ans, il meurt. De nombreux contemporains affirment que Cardano avait annoncé sa mort au jour exact. Comme une revanche d’astrologue. Mais des historiens sont persuadés qu’il s’est suicidé pour accomplir sa prédiction.

Autant vous dire que le garagiste, je ne lui ai parlé de Girolamo. Par contre, j’avais pas prévu que la réparation me couterait un bras. Bonne mère, le joint de Cardano, c’est cher.

Mona joint la culture à la mécanique.