Ô pinard d’espérance !

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Puisqu’en France, on peut maintenant louer le plaisir du vin sans risquer une réprimande des autorités, j’ai le plaisir de vous présenter la superbe chanson interprétée par Michel Simon dans le Vieil homme et l’enfant : Vive le Pinard. Il se dit qu’elle a été créée par des soldats du 140ème RI, mais elle est plutôt l’oeuvre de Louis Bousquet, pour les paroles et Georges Picquet pour la musique. En ces temps de commémoration de la Grande Guerre, c’est un hommage à nos Poilus qui aimaient tant leur pinard. Ce mot qui désigne un vin de piètre qualité serait une dérive du cépage Pinot. Le maréchal Joffre, fils d’un tonnelier de Rivesaltes, glorifiait le général Pinard qui avait soutenu le moral de ses troupes. Quant aux soldats, ils invoquaient Saint Pinard.

Mais assez parlé, chantons maintenant.

Sur les chemins de France et de Navarre
Le soldat chante en portant son bazar
Une chanson authentique et bizarre
Dont le refrain est « Vive le pinard ! »

Un ! deux !
Le pinard c’est de la vinasse
Ça réchauffe là où cque ça passe
Vas-y, Bidasse, remplis mon quart
Vive le pinard, vive le pinard !

Aimer sa sœur, sa tante, sa marraine
Jusqu’à la mort, aimer son étendard,
Aimer son frère, aimer son capitaine,
Ça n’empêche pas d’adorer le pinard

Fier inventeur de la pomme de terre
On a donné ton nom à des esquarres
Mais dis-nous donc alors, que faut-il faire
Pour honorer l’inventeur du pinard ?

Jeune marmot, bois le lait de ta mère
C’est ton devoir, mais songe que plus tard
Cette boisson te paraîtra z’amère,
Un vrai poilu ne boit que du pinard

Le vieux garçon, on s’éloigne à sa vue,
Le vieux laid’ron, on le met z’au rencard,
La vieille bouteille est toujours bienvenue,
Plus il est vieux, plus on aime le pinard

Cèpe des bois, nourriture bien digne
De parfumer le repas d’un Boyard,
Tu ne vaudras jamais le cep de la vigne,
Vu que c’est lui qui donne le pinard.

Dans le désert, on dit qu’le dromadaire
N’a jamais soif, mais c’est des racontars,
S’il ne boit pas, c’est qu’il n’a que d’l’eau claire,
Il boirait bien s’il avait du pinard

On tue les poux avec l’insecticide,
On tue les puces avec que du coaltar,
On tue les rats avec que des acides
Et le cafard en buvant du pinard

On tend l’jarret pour avoir de l’allure,
On tend des pièges pour prendre le renard,
On tend son arc pour avoir la main sûre,
Moi j’tends mon quart pour avoir du pinard

Si vous avez compris ma chansonnette
Je vous en prie, ne soyez pas flemmards,
Prouvez-moi-le en chantant z’à tue-tête
Le gai refrain de « Vive le pinard ! »

Tous en chœur !

Le Pinard

Le Champagne, c’est du pinard à ressort (San Antonio)

Le pinard, çà devrait être obligatoire (Coluche)

J’ai comme toi pour me réconforter
Le quart de pinard
Qui met tant de différence entre nous et les Boches (Apollinaire)

Le+PinardL’origine la plus probable de ce vocable est une déformation de “pinot” le cépage roi de la Bourgogne et du Champagne. On l’utilise, dans le langage vulgaire, dés le XVIIème siècle. Il fut glorifié et personnifié pendant la guerre de 14/18 : le “ père pinard ”.
Une autre historiette court sur le mot. Au XIX° siècle, le docteur Adolphe Pinard (spécialiste en obstétrique) aurait travaillé pour l’armée. Sur ses conseils, on aurait complété les rations de vin avecdu mercure pour protéger les soldats contre les maladies honteuses !… Le bon docteur est mort en 1934 à 90 ans ! Il n’avait pas du consommer beaucoup de sa mixture pour parvenir à cet âge !
Il n’a jamais revendiqué un rôle quelconque dans l’heureuse issue de la grande guerre, pourtant la victoire est toujours revendiquée par beaucoup de pères. Seule la défaite est orpheline.

Durant cette Grande Guerre, on retrouve dans nombre de lettres de soldats des allusions au fameux picrate. Au sens propre, ce mot désigne le sel de l’acide picrique, utilisé dans la fabrication des explosifs. Dans les tranchées, le gros vin rouge qui « attaquait » et était destructeur fut ainsi nommé.

Bon Mona, si on faisait une petite rincette ; mais du bon, pas du genre Clinton[1] qui tache…si vous voyez ce que je veux dire.

[1] Cépage teinturier interdit en France depuis 1935 comme le sont les cinq autres du même groupe : le Noah, l’Herbemont, l’Isabelle, le Jacquez et l’Othello.